Actualités commentées

2024

Effet de la personnalisation d’une intervention à plusieurs niveaux pour améliorer l’utilisation appropriée du dépistage du cancer colorectal chez les patients âgés

Personalized Multilevel Intervention for Improving Appropriate Use of Colorectal Cancer Screening in Older Adults A Cluster Randomized Clinical Trial

Actualité commentée réalisée par Madeleine Lefèvre, Virginie Fossey-Diaz et Thomas Aparicio. - Publiée le 12 avril 2024

JOG 2024 ; 2 (2) : A2

Saini SD, Lewis CL, Kerr EA, Zikmund-Fisher BJ, Hawley ST, Forman JH, et al.

JAMA Intern Med 2023 ; 183 : 1334-42.

AVIS D’EXPERT

L’objectif de cette étude est de réduire l’utilisation globale du dépistage chez les patients après 70 ans en personnalisant les informations données au médecin, au patient, mais aussi en personnalisant les outils prédictifs de bénéfices. Si cette étude montre seulement une tendance à la réduction globale des ordonnances de dépistage dans le groupe d’intervention par rapport au groupe témoin, elle démontre cependant de façon significative que l’intervention personnalisée permet que les patients soient plus susceptibles de recevoir des ordonnances de dépistage concordantes avec les bénéfices attendus d’un dépistage. Ainsi, les patients du groupe d’intervention avec un faible bénéfice attendu étaient moins susceptibles de recevoir des ordonnances de dépistage que les patients témoins avec un faible bénéfice attendu. Les patients du groupe d’intervention avec un bénéfice attendu élevé étaient plus susceptibles de recevoir des ordonnances que les patients témoins avec un bénéfice attendu élevé.
Dans la littérature, l’information du patient âgé affectait la perception de l’efficacité des tests de dépistage, mais pas leur préférences propres6. En ce qui concerne la réalisation du dépistage, un pourcentage plus faible de participants du groupe d’intervention l’ont réellement effectué par rapport au groupe témoin. À noter que cette étude ne montre pas de données concernant le nombre de cancer colorectaux réellement dépistés, ni de données de mortalité spécifique ou globale.

Il est bien établi dans la littérature que le recours à la coloscopie et, si nécessaire, à la polypectomie diminue l’incidence du CCR ainsi que sa mortalité7. Cependant, les bénéfices du dépistage du CCR se voient après 10 à 15 ans, temps nécessaire à la progression des adénomes vers le CCR. Ainsi, le dépistage des patients ayant une espérance de vie inférieure à 10 ans semblerait offrir peu de bénéfices. Mais le bénéfice du dépistage ne dépend pas que de l’espérance de vie du sujet âgé8, mais aussi des comorbidités, et des risques liés à la coloscopie (perforations, saignements…)9.

Cette étude présente comme principale limite la population choisie : il s’agit à 98 % d’hommes. L’âge est limité à 75 ans. De plus, elle ne donne pas les données concernant les patients inclus, notamment concernant le type de comorbidités, la prise de traitement (ex : anticoagulants), la présence de troubles cognitifs pouvant altérer la compréhension et la capacité de jugement du patient. Or ce sont spécifiquement ces fragilités, dites gériatriques, qui vont modifier le pronostic, le déroulement d’une éventuelle coloscopie, et peser dans la balance du choix de dépistage ou non. Une étude visant à mettre en exergue les critères gériatriques impactant le bénéfice du dépistage pourrait être pertinente par la suite.

Préhabilitation ambulatoire avant chirurgie pour un cancer colorectal chez les patients âgés ou à haut risque de complications

Community-based prehabilitation in older patients and high-risk patients undergoing colorectal cancer surgery

Actualité commentée réalisée par Solène Doublet et Virginie Fossey-Diaz - Publiée le 26 janvier 2024

JOG 2024 ; 2 (1) : A1

Groen LC, van Gestel T, Daams F, van den Heuvel B, Taveirne A, Bruns ER, et al.

Eur J Surg Oncol 2023 ; 50 : 107293.

AVIS D’EXPERT

Cette étude, sur une population majoritairement de plus de 70 ans retrouve une réduction de 44 % des complications postopératoires dans le groupe préhabilitation sans réduction significative des complications sévères.

Ces résultats semblent aller dans le même sens qu’une étude rétrospective unicentrique7 qui retrouvait également une baisse des complications post-opératoires (26 % versus 40 %, p = 0,03) mais qui présentait des biais méthodologiques importants. Ces résultats sont également proches de l’étude PREHAB8, une étude randomisée internationale et multicentrique de préhabilitation multimodale hospitalière avant chirurgie pour le cancer colorectal. Cette étude (bras préhabilitation = 123/251 patients) retrouvait une baisse des complications sévères dans le bras préhabilitation (17 % versus 30 %, OR (odds ratio) 0,47 [IC 95 % 0,26-0,87]).

La préhabilitation chirurgicale multimodale semble donc intéressante chez les sujets âgés, même si les résultats restent à interpréter avec prudence pour cette étude unicentrique, à petit effectif, comparée à une cohorte historique. De plus, pour une étude centrée sur le sujet âgé, peu de données gériatriques sont disponibles pour décrire la population. Les quelques données disponibles (17 % d’ISAR ≥ 2 et Charlson Comorbidity Index à 4,7) sont en faveur d’une population autonome et peu comorbide. Sur cette étude tournée vers le sujet âgé, il aurait pu être intéressant de disposer de données gériatriques minimales pour mieux analyser la population incluse9. Cette étude présente toutefois l’avantage de montrer un bénéfice de la préhabilitation chirurgicale ambulatoire.

Il serait utile de confirmer le bénéfice de la préhabilitation chirurgicale multimodale sur des études randomisées multicentriques de plus grande ampleur et de vérifier la faisabilité des programmes proposés chez les patients comorbides et en perte d’autonomie, moins à même d’accepter des déplacements pluri-hebdomadaires.

2023

L’efficacité de la chimiothérapie adjuvante pour les patients âgés présentant un cancer gastrique stade II/III : une étude de cohorte rétrospective

The efficacy of adjuvant chemotherapy for older adults with stage II/III gastric cancer : a retrospective cohort study

Actualité commentée réalisée par Amélie Aregui - Publiée le 05 décembre 2023

JOG 2023 ; 1 (6) : A6

Shih YH, Lin HC, Liao PW, Chou CW, Lin CH, Hsu CY, et al.

BMC Cancer 2023 ; 23 : 770.

AVIS D’EXPERT

Cette étude conclut que la chimiothérapie adjuvante permet un gain en SG chez les patients ≥ 70 ans après une chirurgie pour cancer gastrique stade II/III. En France, les recommandations pour la prise en charge de ces cancers sont de réaliser une chimiothérapie péri-opératoire avec une chirurgie qui dépend de la localisation (jonction œsogastrique ou gastrique) et un curage D2 sans splénectomie ou D1.5. La chirurgie dans cet essai est une chirurgie de résection complète avec un curage décrit comme D2 ou non D21.

L’étude est intéressante car elle étudie les patients âgés (âge médian de 78 ans pour la cohorte des ≥ 70 ans) qui sont peu inclus dans les essais thérapeutiques comme en témoigne l’étude SAGE et dans une maladie spécifique qu’est l’adénocarcinome gastrique2. Le bénéfice de la chimiothérapie adjuvante dans les cancers gastriques, y compris une monochimiothérapie, a été démontré notamment dans une méta-analyse publiée en 2010, dans laquelle le groupe chimiothérapie ne comprend que 24,4 % de patients de plus de 65 ans3. Dans les études de chimiothérapie péri opératoire qui valident le schéma FLOT, peu utilisé chez nos patients âgés en pratique, l’âge médian est autour de 62 ans. L’étude de Mary, montre que le FOLFOX en péri-opératoire est faisable dans une population de vie réelle d’âge médian de 66 ans (53 % de plus de 65 ans)4,5. C’est la chimiothérapie péri-opératoire la plus souvent utilisée pour les sujets âgés fragiles. Dans l’étude ci-dessus qui regarde les données des patients ≥ 70 ans, ils ont le plus souvent bénéficié d’une monochimiothérapie par fluoropyrimidines. Il s’agit d’une étude rétrospective donc les patients qui n’ont pas eu de chimiothérapie sont plus fragiles (plus âgés, avec un ECOG PS plus élevé et un score de Charlson plus élevé) que ceux qui en ont eu, ce qui crée un biais. Cela a été corrigé pour une population de 100 patients (une moitié avec et une moitié sans chimiothérapie) par l’utilisation d’un score de propension de façon à mieux pouvoir comparer les patients, avec un maintien net du bénéfice de la chimiothérapie adjuvante dans cette cohorte. Ce score ne contenait malheureusement pas de données nutritionnelles ou fonctionnelles.

Dans les essais de chimiothérapie péri-opératoire toute population, la chimiothérapie néoadjuvante semble plus facilement réalisable que la chimiothérapie adjuvante. Cela semble encore plus vrai chez le sujet âgé5,6. La chimiothérapie pré-opératoire a pour objectif de traiter les micro-métastases mais aussi de faciliter la chirurgie en réduisant la masse tumorale. Il faut cependant bien évaluer les patients âgés afin de ne pas compromettre la chirurgie1. Par ailleurs, les patients MSI, dont la proportion augmente avec l’âge ne semblent pas bénéficier de la chimiothérapie pré-opératoire, il faut donc rechercher ce statut le plus tôt possible7,8.

Facteurs prédictifs de toxicité d’un traitement systémique chez les sujets âgés atteints de cancer dans le cadre d’un essai clinique randomisé avec évaluation gériatrique approfondie

Predictors and effects of toxicity experienced by older adults with cancer receiving systemic therapy in a randomized clinical trial of geriatric assessment

Actualité commentée réalisée par Emilie Hardy et Virginie Fossey-Diaz - Publiée le 26 octobre 2023

JOG 2023 ; 1 (5) : A5

Mariano C, Brennenstuhl S, Alibhai S, Tejero I, Strohschein F, Monette J, et al.

J Geriatr Oncol 2023 ; 14 : 101584.

AVIS D’EXPERT

L’essor des nouvelles thérapeutiques oncologiques et leur utilisation dans la population gériatrique contrastent avec le manque de données dans cette tranche d’âge2. Cette étude permet d’enrichir la littérature puisqu’elle regroupe des données de toxicités des traitements systémiques et s’intéresse à l’impact sur la qualité de vie et l’autonomie des patients âgés. Le CARG score est validé dans une population particulière qui n’est pas celle de l’étude3. Le G8 est un score de dépistage validé par l’étude ONCODAGE afin de cibler les patients fragiles à adresser au gériatre4. Néanmoins d’autres versions ont été proposées, pour améliorer les performances diagnostiques avec une plus grande homogénéité selon les localisations de cancer5. Une limite importante de cette étude concerne le moment de la réalisation de l’EGA, pas toujours effectuée en amont du traitement et qui a pu limiter l’impact du gériatre dans la décision6,7. En ce qui concerne l’évaluation de la qualité de vie, il aurait été intéressant d’inclure les toxicités dès le grade 2 dans cette population. L’absence d’association significative entre la qualité de vie et la toxicité peut s’expliquer par un manque de puissance (échantillon faible), un contexte particulier (confinement lié au SARS-CoV-2), et une évaluation précoce à 6 mois. Concernant les caractéristiques de la population, il manque des données importantes de l’EGA – qu’il aurait été intéressant de voir figurer dans le tableau 1 : types de comorbidités, données biologiques, lignes de traitements. Dans cette étude, le risque de toxicité est significativement associé à l’altération de l’état fonctionnel au cours du temps, résultat que l’on retrouve dans d’autres études8. En ce sens, il parait fondamental que le corps médical soit sensibilisé aux interventions à mettre en place dès l’apparition de toxicité de grade 2 et à solliciter les équipes gériatriques, afin de limiter l’impact sur l’autonomie des patients. Il semble encore actuellement difficile d’envisager un score « universel » pour prédire efficacement le risque de toxicités de molécules aux mécanismes d’action variés et aux effets secondaires multiples. On pourrait imaginer un outil, dont les paramètres s’adapteraient en fonction des fragilités et comorbidités du patient ainsi que du traitement choisi et des effets secondaires attendus, pour prédire le risque de toxicités. D’autres études sont nécessaires pour évaluer des critères pertinents de prédiction de la toxicité des traitements.

Faut-il associer le pembrolizumab à la chimiothérapie chez les patients de plus de 70 ans atteints d’un cancer bronchique ?

Pembrolizumab alone or with chemotherapy for 70+ year-old lung cancer patients: a retrospective study

Actualité commentée réalisée par Anne-Laure Couderc - Publiée le 19 septembre 2023

JOG 2023 ; 1 (4) : A4

Blasi M, Kuon J, Shah R, Bozorgmehr F, Eichhorn F, Liersch S, et al.

Clin Lung Cancer 2023 : S1525-7304.

AVIS D’EXPERT

Cette étude montre qu’utiliser du pembrolizumab associé à de la chimiothérapie n’améliore pas la survie chez les patients ≥ 70 ans atteints d’un CBNPC avancé et entraine plus de risque de toxicités, d’interruptions de traitement et d’hospitalisations (donc de ruptures de parcours de soins). Ces résultats semblent aller dans le même sens que la méta-analyse de la FDA (Food and Drug Administration) présentée à l’ASCO en 2022 comprenant 12 études cliniques avec 3 189 patients atteints de CBNPC PDL1 ≥ 50 % traités par chimiothérapie + immunothérapie versus immunothérapie seule (38 % de patients âgés de 65-74 ans et 11 % ≥ 75 ans) ; pas d’amélioration du devenir dans le sous-groupe des patients ≥75 ans quand traités par immunothérapie associée à la chimiothérapie versus immunothérapie seule2.

De plus, les patients âgés traités par pembrolizumab et chimiothérapie ont une tolérance (toxicités, interruptions de traitements et hospitalisations) moins bonne que les patients sous pembrolizumab seul, ce qui pose un réel problème dans cette population âgée où la qualité de vie est essentielle. Cette étude est tout de même à prendre « avec des pincettes » car bien qu’elle ait inclus des patients âgés « de la vraie vie » (12 % des patients ont ECOG PS ≥ 2 et 58 % un Charlson ≥ 2), son caractère rétrospectif et monocentrique est à souligner. Enfin, le taux de patients présentant un taux de PDL1 ≥ 50 % était de 100 % sous pembrolizumab seul mais seulement 13 % sous association pembrolizumab et chimiothérapie dans cette étude. Un travail multicentrique et randomisé serait intéressant dans cette population âgée atteinte de CBNPC avancé afin de connaître réellement la tolérance et l’efficacité de l’immunothérapie seule versus l’association de l’immunothérapie et de la chimiothérapie. L’utilisation de données « gériatriques » serait essentielle à la manière de l’étude de Gomes et al. ayant inclus 140 patients (dont 70 patients ≥ 70 ans) atteints de CBNPC ou mélanome traités en première ligne par immunothérapie avec les données de l’Évaluation Gériatrique Standardisée (EGS) pour le groupe des 70 ans et plus : le score de fragilité et de pre-screening G8 était associé au risque de réhospitalisation (p = 0,031) et de mortalité (p = 0,01)3.

L’évaluation gériatrique standardisée préopératoire prédictive du risque postopératoire chez les patients âgés atteints d’un cancer de l’œsophage

Preoperative Comprehensive Geriatric Assessment Predicts Post Operative Risk in Older Patients with Esophageal Cancer

Actualité commentée réalisée par Madeleine Lefèvre et Thomas Aparicio - Publiée le 08 juin 2023

JOG 2023 ; 1 (3) : A3

Yamashita K, Yamasaki M, Makino T, Tanaka K, Saito T, Yamamoto K, et al.

Ann Surg Oncol 2023 ; 30 : 901-9.

AVIS D’EXPERT

L’âge chronologique n’est pas suffisant pour évaluer l’état général d’un patient âgé atteint de cancer, et ainsi appréhender les risques de complications d’un traitement oncologique par chirurgie. Le cancer de l’œsophage est une pathologie du sujet âgé. La médiane d’âge de l’étude de Yamashita et al. est de 78 ans. Le traitement de référence par œsophagectomie fait partie des chirurgies gastro-intestinales les plus invasives1. Cette étude confirme l’importance d’une EGS pour prédire et prévenir les risques de complications et de décès pour les patients dits « fragiles », en perte d’autonomie. Elle confirme également le lien entre MMSE anormal et le risque de confusion post-opératoire, déjà démontré en 2016 par l’étude de Yamamoto et al.2 Il n’y a pas à ce jour de test de dépistage universel permettant d’identifier de manière adéquate la fragilité chez les patients âgés à risque3. Cependant, plusieurs études se sont intéressées à la notion de « fragilité ». Depuis 2012, l’Institut National du Cancer (INCA) recommande de faire un G84, qualifiant les patients de « fragiles » (G8 ≤ 14) devant être adressés chez le gériatre pour une EGS. Les critères de Fried permettent également de classer la population âgée en « robustes », « pré-fragiles » et « fragiles »5. L’étude de Yamashita reprend ces notions sans être comparables cependant à ces scores préalables. Le surgical risk calculator6 prévoit le risque de complications opératoires selon les comorbidités, et l’étude de Laurent et al.7 montre l’impact des comorbidités sur les complications et la survie. Dans l’étude de Yamashita et al., les comorbidités ne sont pas analysées. Dans l’étude PANESAGE (résultats en cours de publication), la lenteur de marche est la variable gériatrique associée à l’adaptation thérapeutique chez les patients de plus de 75 ans atteints de cancer œsogastriques ou pancréato-biliaires8. Le score GRADE de l’équipe du Pr Pamoukjdian9 démontre l’impact de la vitesse de marche et de la perte de poids dans la tolérance d’une chirurgie digestive chez les sujets âgés. Dans l’étude de Yamashita, l’impact des capacités motrices ne sont pas analysées et très peu de données cliniques nutritionnelles (en dehors de la capacité à s’alimenter dans l’indice de vitalité) sont analysées. Ainsi, autonomie et altération cognitive semblent impacter les complications et la survie dans la chirurgie du cancer de l’œsophage, mais d’autres fragilités de l’évaluation gériatrique (comorbidités, motricité et nutrition) doivent être recueillies pour prédire les risques.

Impact de l’évaluation et de la prise en charge gériatrique sur la qualité de vie, les réhospitalisations, les toxicités et la survie des patients âgés atteints de cancer : l’étude 5C randomisée

Impact of Geriatric Assessment and Management on Quality of Life, Unplanned Hospitalizations, Toxicity, and Survival for Older Adults With Cancer: The Randomized 5C Trial

Actualité commentée réalisée par Anne-Laure Couderc - Publiée le 19 avril 2023

JOG 2023 ; 1 (2) : A2

Puts M, Alqurini N, Strohschein F, Koneru R, Szumacher E, Mariano C, et al.

J Clin Oncol 2023 ; 41 : 847-58.

AVIS D’EXPERT

Cette étude est la première étude à s’intéresser à la qualité de vie en objectif principal et l’impact des interventions gériatriques sur ce domaine chez les patients âgés traités pour un cancer par un traitement systémique. Les résultats sont négatifs mais il est actuellement très méritant d’arriver à publier ce type de résultats. Le design de l’étude est très bien pensé ; ainsi il est fort probable que plusieurs facteurs ont entraîné l’absence de significativité de tous les objectifs (principal et secondaires) et notamment les toxicités sévères qui sont diminuées dans les autres études randomisées dans les bras avec interventions gériatriques1-3. Tout d’abord, la mesure de la QDV a été réalisée avec le QLQC30 et n’a pas utilisé l’ELD14 qui est spécifique pour les sujets âgés. De plus, la période de l’étude (2018-2020) a connu la pandémie COVID-19 et les derniers patients inclus ont eu un suivi téléphonique ; et donc l’EPG et la mesure de la QDV ont probablement été différentes par rapport aux patients suivis en présentiel. Le taux de mortalité a d’ailleurs probablement été impacté également par l’épidémie COVID-19. Le choix d’inclure des patients avec tout type de traitement systémique est aussi probablement en cause car la QDV (mais aussi les interventions gériatriques) est influencée par le type de traitement. Enfin, comme l’expliquent les auteurs, il n’y a pas eu de score de repérage de la fragilité avant l’évaluation et la prise en charge gériatrique, entraînant un mauvais repérage des patients fragiles qui auraient nécessité plus spécifiquement une prise en charge de leurs comorbidités et/ou de leurs fragilités. Ainsi, une nouvelle étude randomisée sur le même modèle méthodologique serait intéressante en ajoutant ELD14 à la mesure de la QDV, en incluant des patients âgés traités par la même catégorie de traitement (chimiothérapie ou immunothérapie ou thérapie ciblée), si possible le même type de cancer, avec un outil de screening de la fragilité comme le G8 et par la suite un suivi gériatrique en présentiel.

Efficacité et sécurité des CAR-T ciblant BCMA chez des patients âgés suivis pour un myélome multiple

Safety and Efficacy of BCMA-Targeted CAR-T Therapy in Geriatric Patients with Multiple Myeloma

Actualité commentée réalisée par Capucine Baldini - Publiée le 07 février 2023

JOG 2023 ; 1 (1) : A1

Reyes KR, Huang CY, Lo M, Arora S, Chung A, Wong SW, et al

Blood 2022 ; 140 : 5105-7.

AVIS D’EXPERT

Le myélome multiple est une maladie du sujet âgé. L’âge médian au diagnostic est de 70 ans chez l’homme et de 74 ans chez la femme. Cette étude rétrospective permet de générer les 1ères données dans une population de patients âgés traités par une thérapie innovante. L’efficacité apparait superposable aux données de la littérature et notamment à une méta-analyse publiée en 20201 avec un taux de réponse de 80,5 %, une médiane de SSP de 12,2 mois. Le profil de toxicité est également similaire aux données publiées avec 80 % d’orage cytokinique tous grades confondus et 10,5 % de neurotoxicité1. Les grades d’orage cytokinique, de toxicité neurologique ou d’infections dans les 100 jours ne sont pas détaillés. Ces effets secondaires sont à risque de décompensation de comorbidités et de perte d’autonomie dans la population de patients âgés. Aucune analyse ou description plus fine des patients de plus de 70 ans n’est rapportée (fragilités, comorbidités, co-médications). Compte tenu du manufacturing des CAR-T, il est probable que la population ici rapportée soit particulièrement sélectionnée avec un taux de screen failure qui n’est pas spécifié. L’option aux CAR-T pour ces patients pourrait être les CD3 T cell engager ciblant BCMA avec des taux de réponse, de survie sans progression et d’effets secondaires similaires avec un risque d’infection possiblement plus faible2.

Attention : Ceci est un contenu scientifique indépendant dont l’objectif est de fournir des informations sur l’état actuel de la recherche en matière de prise en charge thérapeutique ; ainsi, les données présentées, bien que référencées d’après des publications référencées et/ou communications/posters de congrès, sont susceptibles de ne pas être validées par les autorités françaises et ne doivent donc pas être mises en pratique. Le contenu a été réalisé sous la seule responsabilité du coordinateur, des auteurs et du directeur de la publication qui sont garants de l’objectivité de cette publication.